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Les chats français par Sofia Becerra

Les chats français ne sont pas comme les autres chats. Les chats français ont toujours une fourrure douce, des moustaches longues et blanches, et un bol plein. Les chats français ne chassent jamais. (Pourquoi pensez-vous qu’il y a tant de souris dans le métro parisien?) Ils ont des pattes délicates qui ne font pas un seul bruit pendant qu’elles glissent sur le sol en bois des appartements du 17ème siècle. Ces pattes cachent aussi des griffes, que les chats français n’utilisent jamais ; mais ils les gardent acérées, juste au cas où. Ils sont très minces, pas comme les chats obèses des États Unis. Ils miaulent même en français, en terminant leurs phrases avec des E nasaux au lieu des [u] ambiguës. Étonnant? Pas du tout.

Les chats français sont, en fait, juste comme les français. Toujours élégants, toujours raffinés. Les femmes impeccables, les hommes tirés à quatre épingles. Les français peuvent être indifférents comme le videur le plus méchant, ou être chaleureux comme le boulanger. Ils apprécient les bonnes choses, comme la nourriture, la musique et les amis. La musique apaise même la plus sauvage des bêtes, n’est-ce pas ? Les français et leurs chats doivent être une espèce à part. Peut-être mon séjour à Paris était une opportunité de les observer. More ?

Heureusement, j’ai ma propre chatte française. Si je veux dire la vérité, je ne connais pas son nom. Ma mère d’accueil, Marie, me l’avait dit au début, mais je ne l’ai jamais compris. La petite chatte a été un cadeau il y a neuf ans. Ce soir-là, les adultes buvaient une bouteille de vin rouge, ou peut-être de rosé, et Marie l’a nommée comme la bouteille de vin. Brigitte, Brigette, Britt, ou quelque chose comme ça. Ça lui convient très bien. Moi, je l’appelle « Vilaine » ou « Linda ». (Comme je suis argentine, je parle à tous les animaux domestiques en espagnol.)

Ma petite Vilaine est grise et noire, avec une fourrure longue et douce. Elle a un visage aplati, qui rend son regard méchant. Au début, j’ai même pensé qu’elle était un peu moche. Maintenant, j’aime son petit nez triangulaire, et ses grands yeux. Elle dort toute la journée. Elle dort à mon côté chaque nuit, et pendant le jour, prend ma place. Elle dort sur mon lit, ma chaise, et quelquefois, je l’ai trouvée endormie sur mon linge. Elle ne bouge presque pas pendant qu’elle dort ; on ne peut voir que son ventre qui se soulève et qui retombe. Parfois, si je reste immobile, je peux entendre sa respiration très douce, sifflante.

Elle est bien élevée, une vraie dame. Quand la porte est fermée et elle veut sortir de la chambre, elle attend devant la porte, me regarde, et miaule une seule fois. Après, quand elle veut rentrer, elle fait la même chose, de l’autre côte de la porte. C’est un système merveilleux. Je suis tous ses ordres.

Cette petite vilaine m’a fait sourire chaque fois que je l’ai trouvée sur mon lit. Son ronronnement a réchauffé mon cœur et elle m’a enseigné qu’une langue n’est pas la seule manière de communiquer. Tant que Duke reste de l’autre côté de l’océan, elle m’a accueillie à Paris, et elle m’a fait sentir chez moi.

Automne 2012