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« Tentative d'épuisement d'un lieu parisien » d'un sylphe absurde - par Ben Ireland

La vie à Paris

Puis-je, cher lecteur épuisé, vous proposer mes services, sans risquer d’être importun ? Restez ainsi allongé au lit, je vous en prie, car je ne suis ici, sous forme d’un beau sylphe absurde dont le nom est Volange, que pour vous raconter mon périple parisien. Décidément, je ne puis dire que tant de bien de mon expérience « dedans Paris, ville jolie », comme le dirait notre cher poète, Clément Marot. Ô, vous êtes d’accord, cher lecteur ! Que d’appas ! Mais les éreintements de la journée ne vous fatiguent point ? Bienfait. Gobichonnez donc mes paroles suivantes : depuis le mois de septembre deux mille dix de notre ère, je me jouis de chaque moment en tant qu’étudiant d’échange d’Educo, étant à maintes reprises en plein vadrouille dans une ville aussi fantasmagorique que Paris. Du bric-à-brac perécien aux matins crépusculaires avec sa Tour Eiffel s’auréolant en arrière plan, Paris m’accueillait avec ses bras ouverts pendant neuf mois inoubliables. Cher lecteur allongé au lit, si vous escomptez passer votre semestre ou même une année scolaire à Paris, il faudra derechef que vous considériez Educo comme votre programme d’échange. Ma préconisation la plus sincère est bel et bien fondée sur l’accueil chaleureux et sur le soutien académique et moral qui m’étaient justement accordés par ce programme. Toujours faut-il évoquer la grande qualité du programme qui laisse, à mon humble, franc et lapidaire avis, d’autres programmes parisiens sous une ombre légèrement saturnine. Ô, quelle chamaillerie escarotique provoqueraient mes icelles paroles tapageuses !

Dans les lignes qui suivent – et permettez-moi, cher lecteur, de vous offrir ma main thaumaturgique – nous traverserons ensemble les courants de mes expériences rétrospectives dans un mesquin bateau analeptique. Si je n’eusse pas été amené à apporter des pagaies virtuelles avec nous, quelles magnifiques vagues de mes souvenirs n’eussé-je point été capable de parcourir, tandis que vous, mon cher compagnon, joyeux compère vérécondieux, folâtre labadens estudiantin, eussiez été noyé par un exécrable tohu-bohu de confusion vertigineuse, et moi doublement puni de vous avoir laissé tout seul. En bateau, donc !

Au gré de deux semestres scolaires, cher compagnon sans prénom, j’étudiai à deux facultés parisiennes en tant qu’étudiant en Lettres Modernes pour obtenir les unités de valeur nécessaires pour ma filière principale, la littérature française, et ce, en combinaison avec ma sous-spécialisation en études asiatiques. Ainsi suivis-je, en tant que Sorbonnard et Diderotien, un pullulement de cours, tels qu’un cours préparatoire à l’Agrégation en Sorbonne, un cours sur la littérature japonaise et un autre cours sur la vie politique de la Troisième République. Grâce à ce dernier, je rentrai chez moi aux États-Unis comme étant à la fois Boulangiste et Dreyfusard. En outre…je --- Quoi donc ? Plait-il ? Ô, il fallait, à coups sûr, que vous eussiez porté un gilet de sauvetage ! S’enfuir du bateau maintenant ? Que me racontez-vous ? Diantre ! L’on vient d’aborder les courants de mes pensées funambulesquement apagogiques ! Vous ne pouvez dorénavant vous évader jusqu’à ce que ce palabreur, qui se réfère inopinément à la troisième personne, close son discours oiseux dont ses créations onomastiques sont d’un méphitique hilarant. Parbleu, j’en étais où …

Ah, oui, je reprends donc.

Vienne la nuit, sonne l’heure, dans un foyer, je demeure. Je vécus dans la Résidence Lucien Paye à la Cité Universitaire qui n’était point loin du centre-ville. La ribambelle d’étudiants internationaux avec lesquels je causais était agréablement fascinante, voire hospitalière à mon encontre. En tant que substance aérienne qui échappe au regard des hommes et trouve de surcroît une place dans les rêveries des humains, je puis rendre visite à ses résidences pour proposer mes services.

Que faites-vous ? Ô Dieu ! Mon compagnon s’évade du bateau céleste ! Ne voudriez-vous point boire mes paroles logorrhéiques ? Ah, mais que vois-je, moi ? Jaçoit que cela soit dangereux de le faire, ce brave homme nage, pataugeant vers une étendue de terre, un cordon littoral en l’occurrence, une île madréporique sur laquelle l’on voit…une bécane…non…un gigantesque quignon…non…mais, hélas, un ordinateur noirâtre qui affiche le site internet d’Educo ! Oui ! Que fait-il maintenant ? Il est rejeté sur le rivage. Nonobstant-ce, il se présente la candidature pour faire partie des étudiants d’Educo du semestre prochain, me semble-t-il ! Quelle folichonnerie absolue que j’éprouve en ce moment ! Hourra ! Bravo, cher compagnon-lecteur !

Maintenant, il faut que je navigue moi-même, sinon – mon Dieu ! Qu’est-ce qui m’attend là ? Un croque-mitaine ? Non, ce n’est point possible. Les courants de mes pensées n’accueillent point de monstres ! Cher compagnon-lecteur, là-bas, au secours ! Au secours ! Auriez-vous l’amabilité de sauver votre beau sylphe, Volange, qui est sur le point d’être une délicieuse pâture pour cet ogre ? Au secours ! Ô, qu’il commence à me mordre jusqu’au sang. Miséricorde ! Cher lecteur, dont le prénom je ne me souviens point encore, bravo d’avoir envisagé Educo comme programme d’échange ! Bon vent !

Je ----- aïe !

Fin.

Ben Ireland, Davidson College, 2010-2011

Printemps 2011